Cours d'autodéfense (Léa, Elliot et Alyson)

Léa avait réussi à venir, bien que ses parents soient quelques peu surpris de cette inscription. Bien sur, leur fille avait omit de dire qu'elle venait seulement pour voir le policier. À peine entrée, elle alla s'assoir dans un coin. Perdue dans la contemplation de son collier, elle ne vit pas le signe de main que lui adressait le prof. Quand ils les appela, la jeune fille se leva d'un bond et s'approcha. Une question lui brulait les lèvres, et étant donné que presque tout les autres participants n'étaient pas dans sa classe, elle leva la main, attendant qu'il l'interroge.

Alyson arriva devant la salle, essoufflée. Elle savait pertinemment qu'elle était en retard, aussi poussa-t-elle doucement la porte du bout du pied. Écouteurs vissés dans les oreilles, chewing-gum à la bouche et canette de soda à la main, elle avança tête baissée vers une place au fond de la salle. En passant près du jeune policier, elle nota toutefois son jeune âge et sa timidité, de même que son air désemparé. Il était plutôt mignon, peut-être trop pour elle, mais il semblait âgé d'un an de plus qu'elle, pas plus.

- Vous vous appelez comment ? demanda-t-elle d'une voix a peine assez forte pour qu'il l'entende.
Quand il la regarda dans les yeux, Léa baissa la tête, embarassée. Elle rougit et se cacha derrière ses cheveux bruns, qu'elle avait lissé hier, ce qui lui faisait beaucoup plus jolis.
Elle osa relever légèrement la tête pour le regarder.

Alyson releva vivement la tête. Ses écouteurs se délogèrent de ses oreilles et vinrent s'écraser au sol dans un petit bruit mat.
- Et m*rde !»
Prenant conscience de ce qu'elle venait de dire, Alyson rougit violemment et bafouilla :
- Oh euh, je... Je suis désolée, je... Je ne voulais pas, et... J-je, p-ardon, Monsieur... Euh...»
Puis elle se tut, la honte la forçant à fermer sa bouche. Sans même se voir dans un miroir, elle savait que le rouge lui était monté aux joues, et elle sentait son cœur tambouriner dans sa poitrine.

Léa se retourna vers celle qui était arrivée en tard. Elle vit ses ecouteurs par terre et sa propriétaire aussi rouge que la jeune fille brune. Cette dernière eut un petit rire. Elle avait l'air d'avoir dans les 18-19 ans, comme le policier.

En entendant le rire amusé qui fusa du fond de la classe, Alyson releva la tête. Une élève, assez jeune, l'observait en souriant. Elle devait avoir environ treize ans, et semblait assez maladroite. Alyson esquissa un sourire et demanda :
- Tu, euh... Tu es en quatrième ? Comment t'appelles-tu ?»
Puis elle lui adressa un sourire gêné. À vrai dire, c'était déjà un miracle qu'elle ait aligné deux mots sans bafouiller ou sans s'arrêter en plein milieu d'une phrase. Alyson avait l'impression de n'avoir jamais parlé à qui que ce soit. Elle se contentait de chanter... Par ailleurs, elle avait "une voix cristalline, comme le chant d'une cascade", d'après les dires de sa tante. Cela dit, il ne fallait peut-être pas en tenir compte, vu son état d'esprit...

Alyson, qui avait oublié la présence du policier, perdit tous ses moyens. Non pas qu'il la troublât, juste qu'elle fut surprise par son intervention inopinée.
- Oh, euh... D-d'accord, Elli... Euh, Monsieur Butia», balbutia la jeune fille, embarrassée par cette situation.

Elliot... Quel joli noom..., se disait interieurement la jeune fille. Joli nom pour joli mec !
Léa se retourna vers la fille derrière. Elle avait l'air sympa. En même temps, la jeune fille s'était toujours beacoup mieux entendue avec les plus grands qu'elle, les trouvant plus matures pour la plus part à part quelques exceptions.
Elle ouvrit la bouche pour répondre à la fille mais elle la referma aussitôt en entendant la voix d'Elliot, juste à côté d'elle. Elle tourna la tête et rougit légerement. Elle rouvrit la bouche pour répondre.
- Je... Je m'appelle Léa. Léa Swan et je suis en quatrième.

Alyson acquiesca, songeuse. Léa était un prénom très agréable à entendre, ce genre de prénom que l'on prononce avec délicatesse, comme si l'on avait le pouvoir de détruire en quelques mots toute une vie, comme si l'on tenait entre nos mains un vase de cristal.
Ce prénom lui susurrait à l'oreille maintes mélodies, toutes plus extraordinaires les unes que les autres. Ce prénom, à la fois doux et passionné, évoquait les plus beaux souvenirs chez Alyson, et c'est automatiquement qu'elle se se mit à fredonner le refrain d'une de ses chansons préférées. C'était une musique calme, dansante et poétique, fidèle à l'image du prénom Léa.
La voix d'Alyson s'éleva, timide d'abord, puis avec un peu plus d'assurance. Elle chantait habituellement dans les alto, mais ce morceau en soprano était son morceau, elle s'était entraînée des heures durant à le chanter avec toute l'émotion et toute la douceur possible.
En réalité, si Alyson n'avait pas senti les regards intrigués des autres personnes sur elle, elle aurait continué dans sa lancée.
Alyson s'interrompit brusquement et bafouilla :
- Ob, euh... Pardon, je... Vous aimez ? C'est mon morceau préféré, et...»
Sentant qu'elle s'enfonçait, Alyson se tut, rouge de honte. Elle aimait beaucoup sa voix, mais les compliments reçus de nombreuses fois lorsqu'elle chantait en public la faisaient rougir. Aussi avait-elle décidé de la fermer.

Une douce mélodie s'éleva au fond de la salle. Léa se retourna et chercha la source de la musique. La fille aux ecouteurs en était la chanteuse. Qu'est-ce qu'elle chante bien ! s'émerveilla interieurement la collégienne en replaçant sa mèche qui lui tombait dans les yeux. Elle attendit que la fille se tue avant de lui répondre.
- Tu chantes trop bien !

Déroutée, à la limite du malaise, Alyson bredouilla un vague merci puis elle enfouit son visage dans ses mains. Elle ferma ses yeux bleus et prit une profonde inspiration.
«Du calme, Alyson, du calme. Elle t'a fait un compliment, souris-lui... Rah bon sang ! Je n'aurais jamais dû... Et ce policier, qui m'a l'air si jeune, trop influencable... S'ils savaient... Zut, je digresse. Bon sang de bonsoir, Alyson TU TE CALMES. Voilà.»
La jeune femme releva alors la tête, déterminée à ne plus flancher. Elle sourit gentiment à Léa et attendit que le jeune policier reprît la parole.

Quand le regard d'Elliot s'arrêta sur la jeune fille, elle sentit son coeur s'emballer. Il retourna enfin à sa place, au regret de Léa. Regret qui disparut aussitôt quand il demanda un volontaire. L'adolescente leva timidement la main. Elle était tout de même impressionnée par la dizaine de personnes qui tournèrent en même temps la tête vers elle. Une fois de plus, ses joues s'enflammèrent.

Alyson reprit ses écouteurs, les refourra dans ses oreilles et ferma les yeux, bercée par la douce mélodie qui chatouillait ses tympans. Elle ne remarqua ni le regard lourd de reproches d'un élève grassouillet, ni l'échange muet qui se passait entre Elliott et Léa. De toute façon, cela ne changerait rien. Personne ne connaissait son prénom – elle n'avait pas eu l'occasion de se présenter – et personne ne faisait attention à elle. Comme toujours, seule dans son coin, attendant vainement une délivrance qui tardait sérieusement à venir.
Elle était dans son petit monde, monde de notes et de paroles susurrées au creux de l'oreille.

Léa se retourna vers la fille. Elle avait remis ses écouteurs. La collégienne s'approcha d'elle et tira sur un écouteur.
- A quoi ça sert que tu sois venue ici si c'est pour rester enfermée avec tes écouteurs ? demanda gentiment la jeune fille brune.

Alyson toisa la jeune fille d'un air mauvais.
- Et toi, à quoi ça sert de venir si c'est pour mater ton fichu policier à la noix ? Demande-lui de t'embrasser et va jouer avec tes copains ou tes barbies, mais laisse-moi en paix. J'ai mes raisons que tu n'as pas besoin de connaître» rétorqua la jeune femme, acerbe. Ses yeux lançaient des éclairs, et sa voix se faisait venimeuse, menaçante. Elle croisa nonchalamment les bras sur sa poitrine et sourit hypocritement à Léa.

Léa eut un mouvement de recul. Elle pria pour que les autres n'aient rien entendu. Elle fusilla du regard la fille mais avant qu'elle n'ait eu le temps de repondre, Elliot lui posa une question. Elle se retourna, ne manquand pas au passage de continuer à toiser la fille aux ecouteurs d'un regard mauvais. Elle se promit de lui répondre après.
Léa s'approcha un peu plus du policier et répondit d'une voix qu'elle esperait sans tremblements.
- Non jamais.

Alyson sourit, narquoise. Le sentiment de puissance qui s'empara d'elle la poussa à se lever et elle débita :
- “Oh ! Attention, monseigneur, à la jalousie ; c'est le monstre aux yeux verts qui tourmente la proie dont il se nourrit.” (Citation prise dans : Othello, William Shakespeare)
Puis elle lança un regard de défi à Léa et se rassit.

Léa se retourna vers le jeune homme, énervée. Elle lança un regard noir à la fille, et elle regarda Elliot.
- J'ai été la voir gentiment, et elle m'agresse. J'me défend comment ? demanda-t-elle, une petite lueur de défi dans les yeux.